Les boutiquiers détaillants ont finalement mis leur menace à exécution. Ils observent une grève de 48 heures sur toute l’étendue du territoire. Cette grève sonne comme une riposte à la mesure du gouvernement de baisser les prix des denrées. Cette décision prise par décret présidentiel à la suite du conseil national sur la consommation n’a pas trouvé échos favorables chez les commerçants. A Kaolack, certainement, comme dans d’autres villes, c’est une journée tournant au sens contraire de l’aiguille d’une montre. Reportage.

A Kaolack, capitale du Saloum connue pour ses échanges commerciaux, les boutiquiers détaillants ont tout simplement baissé rideaux. Difficile de trouver une boutique ouverte : c’est le black out. Dans bien nombre de quartiers, les boutiques ne sont pas du décor des grandes artères et autres rues secondaires. L’ambiance matinale des va- et-vient, n’est non  plus du quotidien des habitués des boutiques de quartier.

Trouver une boutique en ce jour, revient à chercher une aiguille dans une botte de foin. Dans des quartiers comme Boustane, Sara, Bongré, Gasnak et autres il n’est nul besoin de chercher. Quelques tours dans ces lieux ont permis de constater de visu le respect du mot d’ordre. Amadou Diallo, boutiquier au garage Mamoudou Bèye se laisse aller pour donner son appréciation. «  Personne n’observe une grève pour le plaisir. Nous le faisons juste parce que nous voulons adresser un message au gouvernement et nous voulons être entendus », a-t-il avancé. L’air désemparé un peu anxieux, il adresse un regard vide à ses habituels clients. Qui viennent lui supplier de leur vendre quelque chose. Et c’est avec fermeté qu’il refuse de s’exécuter.

En longeant la route qui mène au marché Kibbel, le constat et le décor sont le même. Aucun commerce n’est ouvert. Cette situation frustre un peu le jeune Mor, conducteur de taxi moto. Qui s’en plaint. A califourchon sur sa moto à l’arrêt Jakarta. Il dit ne pas comprendre cette grève qui, à ses yeux n’a pas de sens. « Ce ne sont pas des salariés (les boutiquiers). Par conséquent, ils risquent de s’en prendre à eux-mêmes s’ils continuent leur grève. Ce sont des gens qui vivent au jour le jour », avance-t-il comme argument. Le temps d’amorcer une autre phrase, précipitamment il donne un coup d’accélérateur à sa moto. « C’est un potentiel client qui veut se rendre au marché pour tenter sa chance. Il veut du sucre », me lance –t-il. Ainsi s’éloignent –ils, tous les deux et bruyamment, vrombit le moteur de sa moto. Du pot d’échappement s’échappait un gros nuage de fumée.

Au coin d’une rue la dame Astou Diaby trie une portion de riz dans une calebasse. C’est sûrement pour préparer le repas. Elle ne se plaint pas de la grève. Car, elle, elle avait tout prévu, la veille. «  Dès que j’ai entendu la nouvelle à la radio. J’ai pris toutes les précautions en payant tout ce dont j’ai besoin pour les 48 heures de grève. Donc je ne me plains pas. Par contre je fustige l’égoïsme des commerçants », confie-t-elle.

Les populations qui, pourtant, avaient bien applaudi cette mesure se retrouvent aujourd’hui entre le marteau du gouvernement et l’enclume des commerçants. « Les prix avancés par l’Etat ne nous arrangent pas. Nous sommes en train de vendre à perte », tentent-ils tous de justifier. La section locale de l’association des boutiquiers détaillant veille au grain pour le respect du mot d’ordre. Alors pour cette première journée, la grève semble avoir un succès.