L’opération de vente des cartes de membre de l’Alliance pour la République bat son plein. Elle a mobilisé ministres et directeurs préposés à sa supervision, malgré leurs responsabilités étatiques. Et pour le « marketing » de «commercialisation » des dites cartes, presque tous prêchent la réélection de leur mentor à la présidence de la République, pour un 3ème mandat. Cependant, le prix d’acquisition du sésame d’appartenance à la formation politique au pouvoir risque bien de ne pas être payé par les militants et sympathisants, mais par les responsables, tenus de démontrer leur représentativité. Alors, pourvu que comme par le passé. L’opération ne soit un saupoudrage aux yeux du commanditaire
A la veille de l’élection présidentielle de l’an 2000, les socialistes avaient sillonné et vendu des cartes pour un énième renouvellement des instances de leur vieille formation politique. N’empêche leur mentor de l’époque, le Président Diouf, fut battu au 2ème tour du scrutin de cette année là. Ce successeur de Senghor apprendra ainsi à ses dépens qu’une élection peut se jouer à quelques petites encablures de sa tenue.
Me Wade le vérifiera aussi, après Diouf qu’il releva : comme celui-ci, un 2ème tour fut fatal à son pouvoir.
L’actuel homme fort du pays n’en est pas encore arrivé à cette posture, après une décennie d’exercice du pouvoir. Mais, comme eux le Président Sall a lui aussi décrété la vente des cartes de membres de son parti ; ceci, à moins de 15 moins de la remise en jeu de son mandat. Et pour des ventes sans grand parti pris, il a désigné des superviseurs déployés loin de leurs « bases » respectives. Ils n’ont pas tardé à descendre dans les terroirs à eux affectés. Ils ont commencé à distribuer les lots desdites cartes aux responsables des zones, chacun prenant le soin de désigner son « mandataire » dans son fief. C’est ainsi la compétition entre responsables locaux, sur le terrain et à distance. Chacun tenant à écouler les produits le plus possible. La valeur politique sera fonction du nombre de cartes de membre vendues. Et pour qui sait que les « militants et sympathisants » sont en général aussi éprouvés que les citoyens lambda par la cherté de la vie, la raréfaction et la précarité de l’emploi, il se pourrait qu’ils attendent que les cartes leur soient payées par leurs « responsables » : c’est là une tradition politique bien de chez nous, depuis le temps du « père de la nation sénégalaise ». Et plus d’un demi-siècle après le Président-poète, le parti au pouvoir pourrait vérifier cet état de fait. Car, d’abord, les habitudes ont la vie dure. Et, ensuite, cette formation politique du président Sall reste à être structurée depuis sa création en 2009. Ainsi chaque responsable ne se gênera pas de démontrer qu’il pèse lourd en « plaçant » autant de cartes qu’il pourra. Le cas échéant, sera-ce suffisant et crédible pour attester de sa représentativité ? Ce que veut et recherche leur mentor Sall. Les dès pourraient être pipés de ce fait, puisque détenir une carte de membre « remise », malgré son modique prix, n’est pas forcément synonyme d’engagement sans faille. Une disposition de militantisme dont aura besoin le Président Sall, pour espérer un 3ème mandat, face à une situation économique qui se détériore, une représentation parlementaire qui s’est réduite, des valeurs bafouées par ceux qui sont censés les incarner et une opposition en puissance décidée de s’opposer à sa prétendue volonté de rester aux affaires. Comme quoi, si l’opération de vente des cartes de membre de l’Apr est bien lancée, elle est comme partie pour être pipée.
A D BADER