La décision du gouvernement sénégalais de faire toute la lumière sur le massacre de Thiaroye mérite d’être saluée avec force.
Les fouilles archéologiques ont officiellement commencé sur le site, sous la direction d’experts nationaux. Le Sénégal passe ainsi de l’intention à l’action, en posant un acte fort à la fois historique, moral et symbolique.
Pendant trop longtemps, notre mémoire collective s’est appuyée sur les déclarations de l’ancienne puissance coloniale, qui aurait pu — par intérêt ou par souci d’image — minimiser l’ampleur de la tragédie. Or, il est essentiel aujourd’hui de connaître le nombre exact de victimes et de restituer les faits avec justesse et dignité.
Pourquoi n’y a-t-on pas pensé plus tôt, en plus de 60 ans d’indépendance ? Cette question mérite d’être posée, car elle traduit une forme de dépendance intellectuelle et institutionnelle que l’Afrique doit désormais dépasser.
Cette décision, au-delà de sa portée mémorielle, est profondément stratégique. Elle montre que l’Afrique doit désormais, dans ses relations internationales, envisager des solutions autonomes, alternatives, fondées sur ses propres ressources humaines, scientifiques et intellectuelles.
Il n’est plus acceptable, plus de soixante ans après les indépendances, de se contenter de suivre aveuglément les narratifs fabriqués ailleurs, et souvent dictés par des intérêts géopolitiques ou économiques extérieurs.
J’en appelle également aux journalistes africains : cette décision historique du Sénégal est une opportunité pour eux de sortir du carcan des dépêches internationales toutes faites. Il est temps de s’approprier nos récits, de mener nos propres enquêtes, et de participer activement à la reconstruction d’une conscience collective fondée sur nos vérités, et non celles imposées.
Par Magaye GAYE
Économiste international