Tendances récentes : La croissance en Afrique subsaharienne s’est nettement ralentie en 2022, pour
s’établir à 3,4 %. Les fortes augmentations du coût de la vie conjuguées à la faiblesse de la demande
extérieure et au resserrement des conditions financières mondiales ont freiné la reprise post-COVID dans
de nombreux pays. Les tensions sur les prix des denrées alimentaires, déjà importantes avant la pandémie,
se sont encore intensifiées en raison des aléas climatiques, des perturbations de l’approvisionnement
aggravées par l’invasion de l’Ukraine par la Russie, d’une fragilité et d’une insécurité accrues et, dans
certains pays, de fortes dépréciations monétaires. L’année dernière, l’inflation des prix alimentaires a
dépassé 20 % dans plus d’un quart des pays, ce qui a ralenti la progression des revenus réels et de la
demande des consommateurs et aggravé encore l’insécurité alimentaire.
Le ralentissement important de la croissance mondiale et la chute des prix des produits de base non
énergétiques ont pesé sur l’activité économique de l’Afrique subsaharienne, en particulier dans les pays
exportateurs de métaux. Malgré le récent relâchement des prix mondiaux de l’alimentation et de l’énergie,
les coûts d’importation sont restés élevés, ce qui a contribué à creuser les déficits courants. La précarité
des situations budgétaires due à la pandémie a persisté et, l’année dernière, la dette publique était
supérieure à 60 % du PIB dans près de la moitié des économies de la région. La viabilité de la dette s’est
encore détériorée dans de nombreux pays non producteurs de pétrole, entraînant une hausse des coûts
d’emprunt, des sorties de capitaux et une dégradation de la cote de crédit.
La croissance des trois plus grandes économies d’Afrique subsaharienne — l’Afrique du Sud, l’Angola et
le Nigéria — s’est fortement contractée pour ressortir à 2,6 % seulement en 2022. L’Afrique du Sud,
deuxième économie de la région, n’a enregistré qu’une croissance de 1,9 % en raison de l’aggravation des
pénuries d’électricité et du renforcement des politiques de rigueur pour juguler l’inflation. L’incertitude
politique, le fléchissement de la demande extérieure et les perturbations dues aux inondations et aux
grèves ont aussi nui à la croissance. En Angola, les cours élevés du pétrole et la stabilité de la production
pétrolière ont permis un rebond de 3,1 %. Dans le même temps, la croissance au Nigéria, premier
producteur de pétrole de l’Afrique subsaharienne, a continué de s’affaiblir en raison de l’intensification des
problèmes de production dans le secteur pétrolier. L’inflation dans ce pays a dépassé 21 % en 2022, son
niveau le plus élevé depuis 17 ans, ce qui a entraîné un nouveau resserrement des politiques
économiques. Et pour les populations vulnérables, l’accessibilité des denrées alimentaires s’est encore
détériorée du fait des perturbations dans le secteur agricole et des déplacements de population massifs
provoqués par de récentes inondations dévastatrices.
Perspectives : La croissance en Afrique subsaharienne devrait atteindre 3,6 % en 2023 et 3,9 % en 2024.
Par rapport aux prévisions de juin, la croissance a été revue à la baisse pour près de 60 % des pays, y
compris pour plus de 70 % des exportateurs de métaux qui devraient être pénalisés par la poursuite de la
baisse des cours mondiaux. En dépit de l’atténuation attendue des pressions inflationnistes, le rythme de
reprise devrait rester stable dans de nombreux pays en raison de l’impact négatif de la pauvreté persistante
et de l’insécurité alimentaire sur la croissance, amplifié par d’autres facteurs de vulnérabilité tels que les
conditions météorologiques défavorables, l’endettement élevé, l’incertitude politique, la violence et les
conflits.
Ce ralentissement de la croissance constitue un obstacle majeur pour le développement économique de
l’Afrique subsaharienne. Le revenu par habitant ne devrait augmenter que de 1,2 % en moyenne en 2023-
2024, un taux beaucoup trop faible par rapport aux progrès nécessaires pour réduire durablement la
pauvreté et compenser les pertes de revenus consécutives à la pandémie. Cette année, le revenu par
habitant en Afrique subsaharienne devrait rester inférieur de plus de 1 % à celui de 2019. Et les projections
anticipent que dans près de 40 % des pays, y compris les trois plus grandes économies de la région, le
revenu par habitant n’aura pas retrouvé son niveau antérieur à la pandémie même d’ici à la fin de 2024.
Risques : De nombreux risques de détérioration pèsent sur les perspectives régionales. Un ralentissement
plus marqué qu’attendu de l’économie mondiale pourrait entraîner une chute brutale des cours des matières
premières et freiner la croissance des exportateurs de pétrole et de métaux industriels d’Afrique
subsaharienne. Les conditions financières internationales pourraient se resserrer davantage si les
pressions inflationnistes mondiales persistent plus longtemps que prévu, entraînant une hausse des coûts
d’emprunt et un risque accru de surendettement dans de nombreuses économies de la région. Les
systèmes alimentaires de l’Afrique subsaharienne, déjà mis à mal par les coûts élevés des intrants agricoles
et les pertes de production dues aux conditions météorologiques, restent particulièrement vulnérables à de
nouvelles perturbations qui pourraient entraîner une flambée des prix des denrées et aggraver l’insécurité
alimentaire. Par ailleurs, les niveaux élevés de violence et de conflit risquent encore de s’aggraver si les
conditions de vie continuent à se détériorer. Cette situation, combinée à la fréquence et à la gravité accrues
des chocs météorologiques induits par le changement climatique, pourrait perturber davantage l’agriculture
et retarder les grands projets d’infrastructure et d’exploitation minière dans certains pays.

Source : Banque mondiale