Le président de la République, Macky Sall, avait présidé le 05 novembre 2022 le Conseil national de la consommation. C’était en présence de son nouveau Premier ministre, Amadou Ba et des membres de son gouvernement. Cette mesure, par ailleurs bien accueillie par les Sénégalais, rencontre bien des obstacles pour son application. Du fait, sans doute, des heurts d’avis apparemment antagoniques.
L’injonction de l’application des mesures arrêtées par le pouvoir Exécutif a buté contre la grève de 48 heures des boutiquiers détaillants sur toute l’étendue du territoire. Alors le bras de fer entre l’Etat et les commerçants est loin de connaitre son épilogue. Puisque ces vendeurs menacent de passer à une vitesse beaucoup plus accélérée. Il s’y ajoute que la réalité sur le marché mondial dépasse les deux parties. En effet, bien des arguments du rapport de Commodity Markets Oulooks publiés par la Banque mondiale confortent cette thèse.
N’empêche, l’Etat du Sénégal a tenu à manifester sa volonté de soulager les citoyens en baissant les prix des denrées de première nécessité. Il n’en demeure pas moins que des facteurs extra-muros viennent imposer leur loi. Car, selon la dernière édition du rapport Commodity Markets Oulooks qu’a fait paraitre la Banque mondiale, la dépréciation de la monnaie de la plupart des économies en développement entraine une hausse des prix des denrées et des carburants. Et d’après toujours le constat dudit rapport « ceci pourrait aggraver les crises alimentaires et énergétiques auxquelles nombre d’entre elles sont déjà confrontées ».
Cette réalité du marché mondial impacte, en tout état de cause, les économies des pays, en particuliers les pays africains dont la majorité ploie sous le joug de la hausse du prix du baril de pétrole et celui du blé. Certainement que le chef de l’Etat sénégalais en présidant le conseil national de la consommation était plus informé que quiconque sur ce fait. Les onze mesures prises pour la baisse des prix des denrées et du loyer si l’on se fie à le rapport de la Banque mondiale aura du mal à passer. « La mesure à la longue est d’un goût amer dans la bouche du gouvernement. Elle est plus ou moins teintée de populisme », pense cet enseignant, interpellé sur le sujet. Populisme ou pas populisme, la bataille est engagée.
A y voir de très près la spéculation des prix des denrées dans les pays en voie de développement semble tout de même exogène. Echappant par conséquent au contrôle du gouvernement du Sénégal. De plus, souligne le rapport, «(…) en raison des dépréciations monétaires, près de 60 % des économies de marché émergentes et en développement importatrices de pétrole ont enregistré une hausse des prix du pétrole en monnaie nationale au cours de cette période. Près de 90 % de ces économies ont également connu une augmentation des prix du blé plus importante en monnaie locale que celle observée en dollars. »
Eu égard à ces arguments du rapport, on peut être tenté de comprendre la grève des boutiquiers détaillants. Ces derniers pendant 48 heures avaient baissé les rideaux pour protester contre la mesure de l’Etat. Un sentiment de défiance « inexplicable », d’après le qualificatif d’un ancien militaire interrogé par nos soins. Pour lui, force doit toujours rester à la loi. « L’Etat dispose de tous les moyens légaux et légitimes pour faire appliquer n’importe quelle décision et sur toute l’étendue du territoire », a-t-il martelé.
Dans ce contexte bien explicite sur la cause de la spéculation des prix des denrées, l’Etat du Sénégal se heurte à la dure réalité de la loi du marché mondial. Puisque le rapport de la Commodity Markets Outlooks vient de part et d’autre confirmer les obstacles contre lesquels est confronté l’Etat, malgré sa « bonne volonté » et son pouvoir régalien.